La Swiss Golf Foundation et le boom dans la construction de parcours de golf
Les enjeux
Le sport, tout comme l’économie et la politique, est soumis à des changements constants. Le golf en a également fait l’expérience dans notre pays à la fin des années 1980. L’ASG a dû relever de grands défis, tant en ce qui concerne le développement de l’offre de golf que les résultats obtenus au niveau du sport d’élite.
La demande de possibilités de jeu était plus importante que l’offre. De nombreux clubs affichaient de longues listes d’attente. Dans le même temps, es golfeuses et golfeurs professionnels suisses ont eu du mal à percer au niveau international.
Le comité de l’ASG, sous la présidence de Gaston Barras, s’est donc vu contraint d’emprunter de nouvelles voies pour remédier à cette situation. En mettant sur pied une fondation, l’association cherchait à trouver le soutien nécessaire au développement du golf en Suisse, notamment les moyens financiers supplémentaires requis.
Cette fondation prévoyait d’offrir aux éventuels sponsors la possibilité de participer aux décisions sur l’utilisation des fonds en siégeant au conseil de fondation. Parallèlement, ce fut un moyen de lier des personnalités à l’association de façon visible et publique et de promouvoir ainsi l’image de notre sport.
Première partie : La naissance laborieuse de la Swiss Golf Foundation
Grâce à la Swiss Golf Foundation (SGF), l’ASG a pu faire bouger les choses dans une période difficile, marquée par de grands défis et malgré des difficultés initiales à l’interne. Ces changement concernent à la fois l’acceptation du golf et la probabilité que de nouvelles installations soient construites dans notre pays. Dans le domaine du sport d’élite également, le soutien de la SGF a permis à plusieurs pros (et à une proette) de s’établir au plus haut niveau européen, à l’époque l’European Tour et le Ladies European Tour. Grâce à la Swiss Golf Foundation, les bases du «boom» de la construction de golfs en Suisse, dès le début des années 1990, ont été posées.
Durant la longue période entre 1967 (Schönenberg) et 1992, seuls quatre parcours (Bonmont en 1982, Riederalp en 1985, Domaine Impérial en 1987 et Les Coullaux en 1991) ont pu être ouverts sur le sol suisse.
Afin de répondre à la demande croissante de possibilités de jeu dans notre pays, l’ASG a décidé d’accepter comme membres de l’association des clubs de golf situés à l’étranger proche, ceci à des conditions clairement définies: ils devaient se trouver à 30 kilomètres au maximum de la frontière suisse et au moins 50% des membres et des membres du comité devaient être domiciliés en Suisse. Ainsi, en l’espace de huit ans, pas moins de huit clubs, dont le parcours était situé sur le sol allemand ou français, sont devenus membres de l’ASG, à savoir Marktgräflerland Kandern (1984), Bossey (1985), La Largue (1988), Bodensee (1988), Obere Alp (1989), Esery (1990), Maison Blanche (1991) et Rheinblick (1992).
Malgré cette amélioration passagère du rapport entre l’offre et la demande, l’ASG a poursuivi son objectif de développer continuellement le golf en Suisse à la fois par la construction de nouveaux terrains de golf et par un travail de communication soutenu. Parallèlement, il s’agissait de créer de meilleures conditions cadres pour nos joueurs et joueuses de haut niveau, qui envisageaient une carrière professionnelle. Or pour s’engager dans ces nouvelles voies, l’ASG avait besoin de moyens financiers accrus.
Une initiative tournée vers l’avenir
A l’initiative de Martin Hodler (membre du comité de l’ASG) et de Johnny Storjohann (secrétaire général de l’ASG), et avec le soutien et l’accord du comité de l’ASG, la Swiss Golf Foundation fut officiellement créée le 17 octobre 1992. «Le trésorier ayant donné son feu vert, il est décidé de doter la nouvelle fondation de 50’000 francs», peut-on lire dans le procès-verbal de cette séance.
Extrait du procès-verbal de la séance du comité de l’ASG du 12 juin 1992 (en haut) et inscription au registre du commerce (en dessous).Invitation et ordre du jour de la séance du conseil de fondation du 21 janvier 1993.
Les premiers membres du conseil de fondation furent Martin Hodler (président), Yves Hofstetter (vice-président), Gaston F. Barras (en tant que président de l’ASG) et Johnny Storjohann (en tant que secrétaire général de l’ASG). Peter Epp a été élu directeur de la fondation dans le cadre d’un mandat.
La première réunion du conseil de fondation de la SGF, élargi d’ores et déjà par deux autres personnes, à savoir Josef Ackermann (SKA) et Riccardo Gullotti (Kuoni), a eu lieu le 21 janvier 1993 au Forum SKA (Schweizerische Kreditanstalt AG devenue Credit Suisse par la suite) à Zurich.
Le but de la fondation est – aujourd’hui comme hier – de soutenir et de promouvoir le golf en Suisse, en fonction des objectifs définis par Swiss Golf. Elle complète aujourd’hui encore l’activité de la fédération et s’appuie notamment sur les dispositions de l’art. 5a des statuts de Swiss Golf. (Quant au but initial de la fondation, voir l’inscription au registre du commerce ci-dessus.)
Cela signifie en particulier :
- Organisation et réalisation de manifestations et d’actions visant à promouvoir l’image du golf.
- Encadrement et soutien des playing pros (hommes et femmes).
- Promotion et soutien de golfeurs et golfeuses talentueux.
- Communication et relations publiques en faveur des objectifs de la fondation.
- Prendre toutes les mesures nécessaires pour atteindre les objectifs de la fondation.
Il a été décidé de répartir les tâches comme suit:
- L’ASG s'occupe des intérêts de ses membres (les clubs), surveille et coordonne leurs activités.
- La SGF investit son énergie dans la promotion et le développement du golf en Suisse, tant en ce qui concerne l’élargissement des possibilités de jeu que la promotion du sport d’élite. Elle procure les moyens financiers nécessaires à cet effet.
Aujourd’hui (2024), la Swiss Golf Foundation est reconnue de tous et son objectif fondamental est incontesté. Ce n’était pas forcément ainsi au moment de sa création fin 1992. Voici le bilan dressé par le président du conseil de fondation, Martin Hodler, au bout d’un an: «Nous avons décollé mais n’avons pas encore atteint l’altitude souhaitée.»
Le défi du sponsoring
Pour atteindre ses objectifs, l’ASG avait besoin, comme nous l’avons dit plus haut, de moyens financiers supplémentaires. Le mot-clé était le sponsoring. Il fallait donc rompre avec une vieille tradition profondément enracinée dans le «club-golf» de l’époque. Dans de nombreux clubs, en effet, on entendait dire: «Le sponsoring, l’argent de tiers, nous n’en avons pas besoin, nous n’en voulons pas. Des banderoles publicitaires sur notre parcours – pas question!» Le grand défi était dès lors d’être accepté aussi bien par les traditionalistes (opposés au sponsoring) que par les partisans d’une stratégie progressiste, tournée vers l’avenir.
Du point de vue de l’association, il n’aurait pas été possible de relever les défis sans soutien financier. L’intérêt croissant pour le golf en Suisse à cette époque a cependant attiré des personnes et des institutions qui n’étaient pas forcément en accord avec les objectifs de l’ASG. Les pros et proettes de haut niveau étaient alors courtisés par des managers sportifs, tandis que le tourisme visait en premier lieu des objectifs commerciaux et qu’un certain scepticisme régnait au sein du grand public à l’égard du golf, considéré comme un sport élitiste.
L’ASG est donc arrivée à la conclusion que sans une stratégie plus offensive et sans moyens financiers supplémentaires, elle risquait de perdre l’emprise sur le développement golfique. Elle devait et voulait devenir plus active à tous les niveaux avec le soutien de la Swiss Golf Foundation. Faire passer l’idée de sponsoring était donc un impératif pour l’ASG. Grâce à un grand effort de persuasion, il a été possible de faire accepter cette alternative de financement au niveau de l’association, tout en laissant la liberté aux clubs d’accepter ou non les conditions de sponsoring. Les sponsors, partenaires et donateurs ont été informés en conséquence.
En principe, toutes les parties prenantes voulaient développer le golf en Suisse et créer les conditions cadres permettant à nos proettes et pros de s’établir au niveau de l’élite internationale. La question était de savoir «comment» le faire. Finalement, il a été possible de convaincre la majorité des membres de l’ASG de trouver, par le biais d’une fondation, des sponsors, des supporters et des équipementiers sélectionnés, qui correspondaient aux idées de l’ASG, puis de les lier à l’association et de procurer ainsi les moyens financiers nécessaires.
Par chance, la SKA et d’autres sociétés de renom ont rapidement trouvé de puissants bailleurs de fonds qui ont accepté et respecté les directives internes de l’ASG. Au début, la SKA était le sponsor principal, tandis qu’Audemars Piguet, Swissair et Jaguar figuraient comme co-sponsors. Lacoste et d’autres entreprises fournissaient des produits à des conditions avantageuses. Gerry Heller, alors chef des relations publiques, représentait les intérêts de la SKA. Au fil du temps, les personnalités suivantes du sponsor principal ont siégé au conseil de fondation: Josef Ackermann, Arthur Vayloyan, Walter Berchtold, Oswald Grübel et Barend Gerrit Fruithof.
Remarque: depuis 2007 et jusqu’à aujourd’hui (2024), c’est Rolex et non plus la SKA/Credit Suisse, qui est le sponsor tête de l’ASG/Swiss Golf.
Les bases étaient ainsi posées pour s’attaquer aux objectifs visés. La SGF disposait des moyens financiers nécessaires pour engager à la fois Jan Blomqvist, un coach de renommée internationale, et un directeur général sur mandat en la personne de Peter Epp.
Outre l’engagement de Jan Blomqvist, la SGF a également pu soutenir financièrement les membres du Swiss Golf Team. Ils ont reçu une contribution à raison de 50% des frais annuels occasionnés par la participation aux principaux Tours européens. En contrepartie, ils devaient soutenir les activités de relations publiques de la SGF et se tenir à la disposition des sponsors, partenaires et autres supporters à des dates définies.
Promouvoir la popularité du golf grâce au sport d’élite
La mesure visant à promouvoir le golf de haut niveau en Suisse devait contribuer à rendre le golf plus populaire dans notre pays et à le libérer de son image de «loisir des classes aisées». Le boom déclenché par des stars du golf comme Severiano Ballesteros en Espagne et Bernhard Langer en Allemagne a servi d’exemple lumineux.
«Le président de la SGF Martin Hodler, à l’époque un joueur avec handicap 6, qui appartient sans aucun doute à la nouvelle génération de golfeurs jeunes et dynamiques, s’est porté garant, avec le directeur de la fondation, le Bâlois Peter Epp, lui aussi golfeur actif, que les statuts de la fondation ne restent pas lettre morte», écrivait la «Handelszeitung» en 1993. Et de poursuivre: «Avec le Suédois Jan Blomqvist on a pu recruter pour le Swiss Golf Team un coach de renommée internationale. Co-responsable du ‘miracle golfique’ suédois au cours des 12 dernières années, Blomqvist est également manager de l’équipe suisse et dirige et conseille ses membres.»
Dans une interview accordée au «Blick» en mai 1996, le coach national a tiré un bilan positif: «Nous avons atteint tous nos objectifs jusqu'à présent: en trois ans, une victoire sur le PGA Tour, trois joueurs qualifiés pour le PGA Tour européen, une joueuse sur le circuit féminin, trois joueurs classés dans le top 100 sur le Challenge Tour. Malheureusement, chez les femmes, la relève ne suit pas derrière Régine Lautens (et autrefois Evelyn Orley)».
Il ne faut pas oublier qu’en 1990 déjà, donc avant la formation du Swiss Golf Team, Evelyn Orley avait remporté deux tournois internationaux au plus haut niveau européen: le Ladies Swiss Classic sur le Ladies European Tour à Bonmont (Suisse) et le Singapore Ladies Open sur l’Asian Tour à Singapour.
Quelques mois seulement après l’interview du «Blick», le coach national, alors âgé de 53 ans, est décédé de manière totalement inattendue. Lorsque Jan Blomqvist se remettait chez lui des suites de la chute d’une échelle, il s’est soudain senti mal. Il est mort peu de temps après.
«Pour nous, les joueurs, la perte de Jan Blomqvist est immense et difficile à surmonter. C’était un ami qui était toujours à nos côtés et qui parvenait à nous sortir de l’abattement. Il était toujours là pour nous et nous donnait un sentiment de sécurité», a déclaré André Bossert, pensif, à l’occasion de l’Interlaken Open, quelques jours seulement après la tragique disparition de Jan Blomqvist. L’engagement de Jan Blomqvist avait d’ailleurs également contribué à améliorer l’acceptation du golf au sein de la population suisse.
L’ère après Jan Blomqvist
En novembre 1996, l’association a trouvé un nouveau coach: le Français Hervé Frayssineau (né en 1946) s’est occupé du Swiss Golf Team à partir de 1997.
Frayssineau a signé un contrat avec l’ASG jusqu’à fin 1998, aux termes duquel il devait être à la disposition de la Swiss Golf Foundation en tant que coach et manager pendant 150 jours par an. La collaboration a toutefois duré moins longtemps que prévu. La «NZZ» a écrit à ce sujet: «La Swiss Golf Foundation a déjà effectué fin 1998 le changement du Swiss Golf Team en Swiss Golf, car le golf n’est en fait pas un sport d’équipe, mais une affaire individuelle, selon les précisions du chef de presse André Glauser. Le contrat avec le coach du Swiss Golf Team Hervé Frayssineau n’a donc pas été prolongé, puisqu’il n’y avait plus d’équipe à proprement parler, chaque joueur travaillant avec son propre coach.»
Par la suite, les coachs pour les joueuses et joueurs amateurs ont été directement engagés par l’association. Dès lors, la Swiss Golf Foundation s’est focalisée en premier lieu sur le sponsoring, comme elle le fait encore aujourd'hui.
Une communication professionnelle
Dans le domaine des relations publiques, deux journalistes sportifs renommés, Hugo Steinegger et André Glauser, ont pu être engagés au début des années 1990. L’objectif était d’assurer une couverture médiatique suivie et complète des résultats obtenus par le Swiss Golf Team. Par la suite, la communication professionnelle a été intégrée directement à la fédération. En 2024, avec Doris Rechsteiner, une directrice marketing/communication/sponsoring a été nommée pour la première fois au sein de la direction de Swiss Golf.
Remarque:
Au cours du premier quart de ce siècle, la visibilité du golf suisse s’est encore accrue grâce aux excellents résultats obtenus par nos professionnels, hommes et femmes, au niveau international (y compris aux États-Unis par nos proettes).
Dans le chapitre intitulé («Highlights sportifs et exploits») de la Swiss Golf History vous trouverez une liste chronologique de tous les grands succès des golfeuses et golfeurs suisses de haut niveau.
Les présidents de la Swiss Golf Foundation
- Martin Hodler (1992–1997)
- Martin Kessler (1997–2006)
- Thomas Hentz (2006–2024)
- Reto Bieler (seit 2024)
Deuxième partie : Une question d’offre et de demande
Dès le début des années 1970, l’augmentation du nombre de personnes intéressées par le golf s’est accélérée en Suisse. Il y avait de plus en plus de golfeuses et de golfeurs, mais pas assez de parcours disponibles. La demande dépassait l’offre et dans les clubs, il y avait des listes d’attente. Entre 1970 et 1992, nous l’avons vu, seuls quatre nouvelles installations ont été ouvertes en Suisse, huit autres ont été construites, par la force des choses, à l’étranger proche.
Le 11 septembre 1992, la Swiss Golf Foundation, en voie de création, a organisé une conférence intitulée «Golf & Nature», invitant des représentants de l’agriculture, du tourisme et de la Fédération des coopératives Migros (FCM). L’objectif de la conférence était de convaincre les participants de la valeur et de l’utilité du golf pour notre société.
Le résultat de ce travail de persuasion a été spectaculaire: entre 1993 et 2023, près de 60 nouvelles installations de golf ont été construites sur le territoire suisse, et le nombre de golfeuses et golfeurs est passé d’environ 6000 en 1970 à plus de 100’000 en 2023.
Le «calme avant la tempête» dans la construction de parcours
Mais revenons brièvement en arrière. Entre 1970 et 1992, le nombre de golfeuses et golfeurs en Suisse a plus que triplé, passant d’environ 6000 à quelque 20’000. Dans le même temps, le nombre de clubs est passé seulement de 28 à 40. Sur les 12 nouvelles installations, huit ont été ouvertes dans des pays limitrophes et seulement quatre en Suisse. Les 32 clubs situés sur le territoire suisse ont eu le plus grand mal à faire face à l’augmentation rapide de demandes d’adhésion. Dans ces circonstances, l’admission de joueurs green fee a également dû être limitée.
Si, entre 1967 (GC Schönenberg) et 1992, aussi peu de terrains de golf ont pu être construits en Suisse, c’est en premier lieu à cause de l’opposition de l’agriculture et de la protection de la nature. Chez les agriculteurs, le ton général était le suivant: «La terre n'est pas là pour les riches ou pour les loisirs, mais pour produire des denrées alimentaires et entretenir le paysage.» Pour les représentants de la Fondation suisse pour la protection et l’aménagement du paysage, il s’agissait avant tout de préserver la proximité avec la nature dans notre pays.
Werner Stocker, membre du comité de l’ASG depuis des années et capitaine du Golfclub Breitenloo, a déclaré en 1991, dans une interview parue dans le magazine «Golf & Country», à propos de l’écart qui existait entre l’offre et la demande dans le golf suisse: «Dans un avenir prévisible, avec toujours plus de personnes désireuses de jouer sur le petit nombre de parcours en Suisse, le problème actuel ne va certainement pas diminuer. C’est la face cachée du boom du golf. Les clubs ne peuvent pas répondre aux attentes de tous ceux et toutes celles qui s’intéressent au golf et sont donc souvent critiqués. L’association est impuissante face à cela. Elle pourrait tout au plus essayer d’encourager la construction de nouveaux terrains en Suisse grâce au goodwill dont bénéficie aujourd’hui le golf.»
L’influence de la Swiss Golf Foundation dans le rapprochement avec l’Union des paysans, le tourisme et la Migros
Lorsque le directeur de l’Union suisse des paysans, Melchior Ehrler, a annoncé au début des années 1990 que, pour des raisons économiques et afin d’éviter le «chaos» d’une surproduction, il fallait «geler» quelque 100’000 hectares de terres agricoles, l’ASG et la SGF ont réagi à la vitesse de l’éclair. Selon Melchior Ehrler, le risque était réel que de nombreuses familles paysannes perdent leurs moyens de subsistance en raison de la baisse de la demande en produits agricoles indigènes.
Sur mandat de l’ASG, la Swiss Golf Foundation, en cours de création, a réussi à mettre sur pied en septembre 1992 une importante conférence avec des représentants de l’Union des paysans, du tourisme et de la Fédération des coopératives Migros (FCM), sous le titre «Golf & Nature».
Cette réunion a permis de lancer le dialogue entre le golf, l’agriculture et le tourisme, et ensuite également avec la protection de la nature. Il s’agissait alors de convaincre aussi bien l’agriculture que la protection de la nature de la valeur et de l’utilité du golf pour notre société.
Outre le directeur de l’Union suisse des paysans, Melchior Ehrler, les représentants de l’ASG (le président Gaston Barras et le secrétaire général Johnny Storjohann) et Hans-Peter Danuser (directeur du tourisme de St. Moritz), Eugen Hunziker (président et délégué de la Fédération des coopératives Migros), était également présent. La protection de la nature n’était toutefois pas encore représentée lors de cette réunion. En tant que vice-président de l’ASG et président désigné de la SGF, Martin Hodler a dirigé les débats.
Dans son discours d'ouverture, Gaston Barras, président de l’ASG, a souligné le chemin semé d’embûches que le golf suisse devait emprunter pour se développer. Cette forte personnalité valaisanne, qui a ensuite transformé l’Open de Suisse en European Masters, l’un des événements sportifs les plus importants de Suisse, était déjà connu loin à la ronde pour son grand engagement en faveur du golf en général et du golf suisse en particulier.
Johnny Storjohann, alors secrétaire général de l’ASG, a donné pour sa part des informations détaillées sur l’état d’urgence du développement du golf en Suisse, (forte demande – petite offre).
Le fait que Melchior Ehrler ait accepté de participer à cette conférence en tant que panéliste était un signe clair de l’intérêt croissant de l’agriculture suisse à entrer en contact avec les représentants du golf et à se pencher sur la valeur et l’utilité du golf pour la société et pour la nature. Il s’est alors rendu compte que grâce au golf, les terres agricoles disponibles dans certaines régions peuvent être utilisées de manière plus rentable que par la production de biens agricoles.
Hans-Peter Danuser, le directeur du tourisme de St. Moritz, a souligné qu’il faudrait construire davantage de parcours de golf en Suisse, notamment du point de vue du tourisme. Mais il a également rappelé que la construction de terrains de golf devait se faire dans le respect des besoins de la protection du paysage.
A la fin de la manifestation, Eugen Hunziker (en tant que représentant officiel de Migros) a félicité l’ASG pour la création officielle imminente de la Swiss Golf Foundation et pour l’organisation de cette journée «Golf & Nature». Il a précisé que quatre projets concrets de terrains de golf étaient déjà à l’étude chez Migros. Si au moins deux de ces projets devaient être réalisés au cours des cinq à six années à venir, il en serait très heureux et s’engagera également dans ce sens au sein de la FCM.
La motivation de soutenir le golf en Suisse était en outre l’un des objectifs de Migros dans le cadre du Pour-cent culturel: «Afin de promouvoir le sport et l’activité physique de diverses manières, Migros soutient, entre autres, le travail de nombreuses associations.»
Les principaux arguments par rapport à l’agriculture
Dans le cadre d’une comparaison entre l’utilisation des surfaces par l’agriculture et le golf, la SGF a fait les comparaisons suivantes sur la base des statistiques d’alors:
- Rendement par l’utilisation agricole: environ 9 centimes par m2
- Rendement de l’utilisation par le golf: environ 30 centimes par m2 (sur la base des loyers que devaient payer environ 60% des clubs de golf à l’époque).
- Nombre de personnes pouvant gagner leur vie avec l’agriculture sur 50 à 100 hectares: 6 à 8
- Nombre de personnes pouvant gagner leur vie grâce à un terrain de golf sur 50 à 100 hectares: 15 à 20
A cela s’ajoute le fait que les compétences nécessaires dans l’agriculture (notamment l’évaluation des conditions météo) sont largement les mêmes que celles qui permettent d’assurer un bon greenkeeping. En d’autres termes, les agriculteurs et agricultrices pourraient également devenir d’excellents greenkeepers.
Grâce à ces réflexions, l’opposition de l’agriculture face au golf a diminué. De plus en plus de propriétaires d’exploitations agricoles ont réalisé qu’il était possible de gagner davantage avec le golf qu'avec l’agriculture. De plus, le Plan Wahlen, en vigueur durant la Seconde Guerre mondiale, avait montré qu’à l’exception des greens (3% de la surface totale d’un terrain de golf), il était possible de passer à tout moment du golf à l’agriculture et de revenir au golf si nécessaire. C’est d'ailleurs ce qui a été pratiqué sur les parcours de Dolder à Zurich, Bad Ragaz, Lucerne et partiellement au Gurten pendant et après la Seconde Guerre mondiale.
Ce changement de mentalité a conduit de nombreux propriétaires d’exploitations agricoles à prendre contact avec le secrétariat de l'ASG et à mettre leurs terres à disposition pour la construction d’un terrain de golf.
La protection de la nature fait preuve de perspicacité
Lorsque les représentants du golf ont assuré en outre que, lors de la construction de nouveaux terrains de golf, on pensait en premier lieu à des surfaces agricoles sur-fertilisées et non à des zones proches de la nature, la Fondation suisse pour la protection et l’aménagement du paysage a révisé son attitude fondamentalement négative. Un exemple typique est le Golfclub Wylihof (fondé en 1994). Ici, une surface agricole sur-fertilisée et dépourvue de cours d’eau ouverts a donné naissance à un écosystème dans lequel les espèces végétales et animales les plus diverses, autrefois présentes, se sont réinstallées en très peu de temps.
Aujourd’hui, des canards nagent dans les obstacles d’eau de Wylihof. Renards, chevreuils et autres petits gibiers sont des hôtes fréquents sur le terrain et dans les forêts environnantes. Les représentants de la protection du paysage étaient d’accord pour dire que la réalisation du projet de golf Wylihof avait apporté une revalorisation écologique du terrain.
Une fois que les bases politiques pour la construction de nouveaux terrains ont été posées, notamment grâce au soutien de la Swiss Golf Foundation, il s’agissait de les mettre en œuvre concrètement. Dans le chapitre «L’histoire du golf suisse» nous montrons en détail combien l’univers du golf a changé dans notre pays depuis le début des années 1990.