Paragolf
Au début il y eut les «one-armed golf players»
Comme il se doit, les premiers paragolfeurs sont originaires d'Écosse, le «Home of Golf». Dès 1892, la revue britannique «Golf» a fait état de deux golfeurs manchots originaires d'Écosse, James Kerr et Archibald Smith, tous deux membres du GC Leven Links, où ils ont tous les deux réalisé un score record identique de 91 coups.
Les premières compétitions entre «golfeurs manchots» remontent au début du 20e siècle. En 1908, un tournoi international sur 36 trous a opposé les Français aux Anglais au Golf Club La Boulie, près de Paris. A la grande surprise des Anglais, c’est le Français Yves Botcazou qui est sorti vainqueur avec un score de 180 coups sur 36 trous. Il a notamment battu le champion britannique John Haskins (voir la galerie de photos en début de chapitre).
Yves Botcazou, un apprenti boulanger, devenu caddie à La Boulie après un accident de travail, était célèbre pour la précision de son putting et de ses approches. Il a notamment participé à l’Open de France 1911 (30e avec une moyenne de 82 coups par tour) et à l’Open de Grande-Bretagne 1914. N’étant pas mobilisé pendant la Première Guerre mondiale, il a été promu headpro à La Boulie. En 1919, il a fait une brillante tournée aux Etats-Unis, jouant notamment des exhibitions contre le «one-armed golfer» américain Luis Martucci. En 1925, Botcazou est devenu membre de la PGA de France, tout juste fondée. Il est mort en 1953 à 72 ans.
Objectif Inclusion
L’engagement de Swiss GolfDepuis les débuts inofficiels du paragolf, illustrés par ces quelques photos historiques, la situation a beaucoup changé. Cela ne concerne pas uniquement le golf, mais les activités sportives de manière générale. Aujourd’hui, le sport n’est plus réservé aux seules personnes valides; tout le monde a entendu parler des Jeux paralympiques qui suivent traditionnellement les JO «ordinaires» (malheureusement toujours sans inclure le golf, comme on verra plus loin).
Ce que l’on sait moins, c’est que cet élan en faveur de l’inclusion de tous dans la grande famille du sport date de l’immédiat après-guerre. En 1948, les «Stoke Mandeville Wheelchair Games», du nom d’un hôpital au nord de Londres, ont rassemblé des vétérans invalides de la Deuxième Guerre mondiale et ont sans doute agi comme un déclencheur pour les compétitions ouvertes aux personnes souffrant d’un handicap physique ou mental. Dans de nombreux pays, des organisations en faveur du sport-handicap ont progressivement été mises sur pied, à l’image de la Suisse avec la fondation, en 1960, de l’organisation faîtière PluSport, devenue aujourd’hui le centre suisse de compétence pour le sport-handicap et l’inclusion, aussi bien dans le domaine du sport populaire que dans celui du sport d’élite et de la promotion de la relève.
«Nous nous réjouissons de faire du golf l’un des sports les plus inclusifs en Suisse.»
«Swiss Golf aspire aux mêmes objectifs: promouvoir le golf auprès des personnes en situation de handicap et encourager les meilleurs joueurs et joueuses à participer à des compétitions au plus haut niveau», déclare Barbara Albisetti-Heath, Directrice Sport de Swiss Golf. «Afin d’assurer une certaine organisation dans le développement, Swiss Golf collabore étroitement avec PluSport et Special Olympics», poursuit-elle. De plus, Supporting Golf Together (qui réunit Swiss Golf, l’ASGI et Migros GolfCard) soutient financièrement plusieurs événements.
La Directrice Sport de Swiss Golf souligne qu’il est essentiel de sensibiliser le monde du golf suisse à cette thématique et de faciliter l’accès des personnes en situation de handicap aux activités des clubs. «Nous nous réjouissons de faire du golf l’un des sports les plus inclusifs en Suisse», conclut Barbara Albisetti-Heath.
Nous donnons ci-dessous un aperçu des associations et des grands évènements para-golfiques en Suisse et dans le monde en présentant notamment quelques athlètes suisses qui y ont participé.
Swiss ParaGolf Association
Fondée en novembre 2022, la Swiss ParaGolf Association (SPGA) a pour objectif de promouvoir le golf auprès des personnes en situation de handicap, de faciliter l'accès et l’inclusion, de favoriser l'expérience communautaire et le sentiment d'appartenance ainsi que la compétition au niveau national et international. L’association organise également des évènements et soutient des tournois de charité.
Le moteur de l’association a été l'actuel président Patrick Rosenast, qui souffre d'une hémiparésie du côté gauche du corps depuis fin 2020 suite à une hémorragie lors d'une opération du cerveau. «Le golf signifiait beaucoup pour moi, et il fallait absolument que je retourne sur le terrain pour savoir si je pourrais un jour rejouer au golf», raconte ce dynamique quinquagénaire. Constatant que la Suisse était plutôt en retard par rapport aux pays voisins, il a décidé, avec quelques personnes partageant ses idées, de fonder la SPGA, qui compte actuellement 19 membres actifs et plus de 50 membres passifs et de soutien. Mais il existe encore beaucoup d’autres personnes souffrant d'un large éventail de handicaps qui jouent au golf en Suisse, que ce soit comme passe-temps ou avec des ambitions sportives. Dans l'idéal, elles devraient toutes adhérer à la Swiss ParaGolf Association.
Aujourd'hui, de plus en plus de clubs de golf helvétiques facilitent l'accès aux personnes en situation de handicap et les règles de golf adaptées leur permettent désormais de participer à des tournois ouverts. La SPGA s'efforce de sensibiliser les clubs aux besoins spécifiques des personnes handicapées, par exemple en ce qui concerne les tarifs des voiturettes et des chariots, qui sont mis à leur disposition gratuitement ou à des tarifs réduits dans la plupart des pays européens. Un répertoire des clubs de golf suisses plus ou moins bien adaptés aux besoins des personnes en situation de handicap, notamment en ce qui concerne les fauteuils roulants, est prévu pour 2025.
«Championnat pour tous» à Bonmont
En 2023, Swiss Golf a organisé au Golf & Country Club Bonmont la deuxième édition de son Championnat pour tous. Comme l’année précédente, lors de la première édition à Ascona, l’évènement était placé sous le signe de l’inclusion et regroupait les finales du Swiss Golf National Championship pour les meilleurs golfeurs et golfeuses amateurs du pays, le Swiss Golf Open G4D Championship pour les personnes en situation de handicap physique (avec 17 participant-es) ainsi que les Special Olympics foursomes et singles pour les personnes en situation de handicap mental. Mieux que des mots, notre galerie de photos témoigne de cette magnifique journée «inclusive» de partage et d’amitié.
Photos © Studio Patrick Jantet
PluSport et Special Olympics Switzerland
Jérôme ReynardEn Suisse, plusieurs organisations sportives s’engagent en faveur des personnes en situation de handicap et de leur inclusion dans le monde du golf. Le point avec PluSport et Special Olympics Switzerland, partenaires de Swiss Golf.
L’inclusion est un sujet majeur pour Swiss Golf. Dans ce sens, la fédération s’est associée à PluSport, l’organisation faîtière du sport-handicap suisse, et à Special Olympics Switzerland, le mouvement qui s’engage pour les personnes en situation de handicap mental, avec un objectif clair et unanime: favoriser la pratique du golf.
«Selon nous, cela commence par la sensibilisation, d’abord auprès des clubs, le but étant que les golfeuses et golfeurs en situation de handicap puissent utiliser les infrastructures, avec leurs besoins spécifiques», explique Olivia Stoffel, responsable du sport d’élite chez PluSport. «Mais il s’agit également de sensibiliser les non-golfeurs en situation de handicap au fait qu’il est possible pour eux de pratiquer cette activité et d’être soutenus dans cette démarche.»
La collaboration entre Swiss Golf et PluSport date de 2021. «Le golf est un sport bon pour la santé, qu’on pratique en plein air, et où une partie peut se composer de personnes avec ou sans handicap. C’est de l’inclusion pure», avance Olivia Stoffel. Sur le plan du sport d’élite, le paragolf n’est en revanche pas encore au niveau de certaines autres disciplines. «Nous avons mis en place une structure, dans laquelle cinq athlètes font partie d’un cadre, mais il n’y a pas d’équipe nationale à proprement parler», concède-t-elle.
Championnat national
Depuis 2022, il y a toutefois un championnat de Suisse chapeauté par Swiss Golf. Un tournoi qui s’inscrit dans le cadre du Swiss Golf National Championship, où les meilleurs paragolfeurs et paragolfeuses se disputent le titre national au même endroit que les meilleurs amateurs et amateures du pays. Et où une compétition destinée aux personnes en situation de handicap mental est également organisée. L’édition 2022 s’est déroulée à Ascona, celle de 2023 à Bonmont. «Le Swiss Golf National Championship est une vitrine intéressante pour se faire connaître, pour faire savoir que des organisations qui développent le golf pour les personnes en situation de handicap physique ou mental existent», se réjouit Aldo Doninelli, Sports Coordinateur de Special Olympics Switzerland, dont les événements se déclinent à plusieurs niveaux. «Il y a ce championnat où nous sommes invités par Swiss Golf, mais il y a aussi des évènements estampillés Special Olympics, où le golf s’inscrit dans un programme multisports. Je pense aux Regional Games et aux World Summer Games», explique Aldo Doninell, qui souhaite également organiser des tournois de golf inclusifs dans différentes régions du pays, en se greffant sur des compétitions de club classiques.
Un exemple unique
Les événements de Special Olympics Switzerland s’adressent à des joueuses et joueurs de tous les niveaux. Les catégories de compétition vont d’exercices au driving range, basés sur un système de points, à des parcours disputés par des équipes composées d’une personne en situation de handicap mental et d’une autre qui ne l’est pas, voire des parties jouées de manière indépendante par une golfeuse ou un golfeur membre du mouvement.
Outre les compétitions, Special Olympics Switzerland s’engage aussi à développer de nouvelles opportunités d’entraînement sur les terrains de golf. Tout un programme, pour un mouvement répertoriant au total 21 sports d’été ou d’hiver. Depuis cinq ans, la plupart des fédérations nationales ont augmenté leur sensibilité à la question de l’inclusion. «Mais je dois dire que Swiss Golf fait partie des plus actives. L’invitation dans le cadre de son championnat national est à ce jour un exemple unique en Suisse», conclut Aldo Doninelli.
(Cet article est paru dans le magazine Swiss Golf 3/2023)
La nouvelle Règle 25
Auparavant traitées dans les règles locales des tournois, les règles modifiées pour les joueuses et joueurs en situation de handicap font depuis 2023 partie intégrante des Règles de Golf, sous la Règle 25. Désormais, ces règles modifiées sont valables en tout temps, alors qu’avant il appartenait à chaque organisateur de compétition de décider d’adopter ou non l’une ou plusieurs d’entre elles.
Concrètement, la Règle 25 apporte des modifications à certaines règles pour permettre aux joueuses et joueurs ayant des handicaps spécifiques de jouer équitablement avec des golfeuses et golfeurs qui n’ont pas de handicap, le même handicap ou un autre type de handicap. Des adaptations sont prévues pour les personnes aveugles ou mal voyantes, amputées ou utilisant un dispositif d’assistance à la mobilité, et ayant des déficiences intellectuelles.
Scannez le QR-Code pour en savoir plus sur la Règle 25.
+QR Code Rule FRA (ou la règle en entier)
Le golf et les Jeux paralympiques
Jusqu’à présent, le golf n’était pas considéré comme un sport paralympique. La Fédération internationale de golf (IGF) a voulu changer cela et a posé sa candidature pour figurer au programme des Jeux paralympiques de Paris 2024. Malheureusement, le Comité international paralympique a rejeté cette demande. Reste à espérer que l’IGF tente à nouveau d’introduire le golf dans le cadre du processus de candidature pour de futurs Jeux paralympiques.
«Le partenariat de PluSport avec Swiss Golf doit permettre de poser la première pierre d'une collaboration plus étroite dans le domaine du paragolf», selon Olivia Stoffel, responsable du secteur Sport d’élite de PluSport. L’objectif est de permettre aux para-golfeurs d'accéder à des infrastructures adaptées et de les amener au sommet de la hiérarchie internationale. En participant à des tournois internationaux, la Suisse apporte sa contribution pour que le golf soit intégré au programme paralympique de 2028 à Los Angeles. En effet, plus il y aura de joueurs pratiquant activement le golf dans le plus grand nombre de pays possible, plus les chances de voir le golf reconnu comme discipline paralympique augmenteront.
EDGA: l’organisation faîtière en europe
L’EDGA (European Disabled Golf Association) est une organisation à but non lucratif, active dans la promotion et l’offre de possibilités de découvrir, de participer et de concourir dans le golf. L’EDGA conseille le R&A, la Fédération internationale de golf (IGF), le DP World Tour et l’Association européenne de golf (EGA) dans le domaine du golf pour personnes handicapées.
L'EDGA a été fondée en 2000 à Wiesbaden dans le but d’établir des règles, d’uniformiser la définition du handicap physique et mental ainsi que les conditions d’admission aux tournois. Elle compte actuellement plus de 36 fédérations nationales affiliées dans le monde, dont 40% se trouvent en dehors de l’Europe.
En se concentrant sur le développement du jeu, l'EDGA a conçu et mis en œuvre des programmes de formation des entraîneurs pour les centres de réhabilitation, les hôpitaux et les clubs de golf et délivre notamment des licences aux golfeurs et golfeuses en situation de handicap. Toutes ces initiatives sont à la disposition des membres de l’EDGA, tout comme les protocoles d’organisation des tournois, les définitions du handicap et d'autres programmes destinés à accroître le nombre de golfeurs et golfeuses handicapés dans le monde.
L'EDGA organise chaque année environ 70 tournois dans trois catégories:
1. Stableford (hcp 18.5 - 54)
2. Strokeplay net (hcp 7.5 - 18.4)
3. Strokeplay brut (hcp 7.5 ou mieux)
Le G4D Tour, lancé en février 2022 avec huit à dix tournois par an, fait partie de l'engagement du DP World Tour en faveur de l'inclusion dans le golf et s'adresse aux meilleur-es du classement WR4GD (World Ranking for Golfers with Disability). Les tournois G4D se déroulent sur le même parcours et durant la même semaine que ceux du DP World Tour. L'European Tour Group prend en charge les frais de participation au G4D Tour.
Des associations analogues existent sur d'autres continents, comme par exemple l'USAGA (US Adaptive Golf Alliance), l'ADGA (American Disabled Golfers Association), la NAOAGA (North American One-Armed Golfer Association) ainsi que la JBGA (Japanese Blind Golf Association), qui organisent des tournois au niveau régional, national ou international.
The R&A lance le premier G4D Open
Le premier Open pour golfeurs et golfeuses en situation de handicap physique ou mental, co-sanctionné par The R&A et le DP World Tour, a eu lieu à Woburn, en Angleterre, en mai 2023.
Le G4D Open est organisé en partenariat avec The R&A et le DP World Tour et soutenu par l’EDGA. Il s’agit du tournoi de golf le plus inclusif sur la base du WR4GD et accueille des joueurs et joueuses de tous âges, amateurs et professionnels. Environ 80 des meilleurs paragolfeurs et -golfeuses (hcp 36 ou mieux) en provenance de 19 pays, se sont affrontés lors du premier G4D Open 2023 sur le Duchess Course de Woburn, sur trois tours et dans neuf catégories de handicaps physiques ou mentaux. Le G4D Open se tient à nouveau à Woburn en mai 2024.
GOLF IS OPEN TO ALL
Transplant Games
Depuis une quarantaine d’années, des compétitions internationales sont organisées dans le monde à l’intention des athlètes transplantés. Parmi eux, des golfeuses et des golfeurs suisses..
Les premiers Jeux mondiaux des transplantés ont été organisés en été 1978 à Portsmouth (Angleterre) et ont lieu depuis lors tous les deux ans. En 1994, les premiers Jeux mondiaux d’hiver des transplantés se sont tenus à Tignes (France) et ont désormais lieu tous les deux ans en alternance avec les Jeux d’été. Ils sont ouverts aux participant-es âgés de 4 (!) à 80 ans, qui ont subi une greffe d'organe ou de moelle osseuse.
Au niveau européen, les premiers Transplant and Dialysis Games ont eu lieu à Athènes en 2000. Ils se tiennent également tous les deux ans et sont aussi ouverts aux athlètes dialysés. Tous ces grands événements sportifs mettent l’accent sur l'importance du don d’organes.
Videoreportage von Fabiano Pararore:
https://youtu.be/n4uDTRihuqQ
Instagram: @Miro_Waldvogel
https://www.mirowaldvogel.com/
Hommage
Le défi d’Yves Auberson, ancien pro sur le TourSacré champion suisse junior de golf en 1988, le Vaudois Yves Auberson devient pro et joue pendant dix ans sur le circuit. A 35 ans, il est diagnostiqué avec la maladie de Parkinson. Il redevient sportif d’élite – mais cette fois-ci pour survivre – et traverse même les Alpes à pied. Au printemps 2023, Yves Auberson nous a quittés.
Thérèse Obrecht Hodler
C’est une histoire de courage et de volonté. Celle d’un jeune père de famille, grand sportif, qui apprend qu’il souffre de Parkinson, une maladie neurodégénérative qui provoque la destruction progressive des neurones à dopamine dans le cerveau, ces transmetteurs qui régulent la motricité. A 35 ans, peu après la naissance de son fils Arno, les médecins lui annoncent que son espérance de vie est de 15 ans, tout au plus. Ils n'ont pas compté avec la force mentale d’Yves Auberson, un compétiteur dans l’âme, qui s'est battu comme un lion pendant près de vingt ans contre cette maladie incurable.
Nous avons rencontré l'ancien golfeur professionnel deux ans avant sa mort. Il a dévalé les escaliers pour ouvrir la porte du petit immeuble de Nyon, où il habitait alors. Il a parlé de ses «quinze ans de vie commune avec Parkinson», avec une ironie dont il ne s'est jamais départi malgré la brutalité des coups du sort. Ses dix années de golfeur professionnel sur le circuit européen, notamment avec le Valaisan Steve Rey – «mon super pote» – ont été passionnantes, mais financièrement précaires. Yves Auberson a mis fin à sa carrière sur le Tour et a suivi une formation de coach sportif. Le sport était littéralement inscrit dans ses gènes: son père (Bernard) fut un ancien joueur de Coupe Davis et sa mère (Maya Auberson-Roth) était championne suisse de tennis avant de devenir l'une des meilleures golfeuses amateures du pays. «Le sport est le meilleur remède. Quand je marche, mon corps a l’air d’oublier la maladie», a dit Yves Auberson.
«J’étais comme un funambule
sur la corde raide.»
La traversée des Alpes
Cette découverte deviendra son mantra et sa raison de vivre. En 2019, il fonde l’association Défi Parkinson, dont le but est à la fois de combattre les idées reçues et de montrer qu’une activité sportive intense permet d’atténuer les effets de la maladie et, dans le meilleur des cas, de réaliser ses rêves. Yves Auberson en fournit la preuve en traversant les Alpes en cent jours, soit plus de mille kilomètres à pied, par monts et par vaux, à coup de quatre ou cinq heures de marche quotidienne. Un ami avait planifié toute la logistique, les étapes, les jours de repos et aussi le transport des quelque 1800 pilules qu'Yves devait ingurgiter pendant ce marathon de trois mois. Son fils Arno, alors âgé de 17 ans et étudiant en HECECHEC, l'accompagne pendant plusieurs jours et voit son père qui chute, s'écorche les genoux et se tord la cheville – mais qui se relève toujours. «J’étais comme un funambule sur la corde raide. Mais je me bats parce que je ne veux pas que la maladie prenne le dessus», a souri Yves Auberson, ajoutant qu’il est «revenu à la vie» pendant cette longue marche, qui s’est terminée sur les quais de Montreux sous les acclamations de ses amis et supporters.
Le sport intégré à la thérapie
«Ma vie est un défi», le film émouvant de Stephan Rytz, retrace cet incroyable exploit. Des extraits diffusés à la télévision suscitent un écho formidable. Des milliers de personnes écrivent à Yves Auberson, ravi de «montrer aux patients atteints de la maladie de Parkinson qu'on peut malgré tout accomplir des choses». Par la suite, Yves est engagé comme coach sportif à la clinique Valmont de Glion, où il s’occupe notamment de patients souffrant eux aussi de maladies dégénératives. «Le sport est aujourd’hui intégré dans les thérapies et permet d’atténuer les syndromes de la maladie. Je joue un peu le rôle de modèle et les patients me parlent facilement de leurs soucis de santé», a raconté Yves Auberson, passionné par cette nouvelle activité.
Un répit de courte durée
Après la traversée des Alpes, ses médecins proposent à Yves Auberson une opération dite de «stimulation cérébrale profonde», afin de réduire à la fois les symptômes du Parkinson et la quantité de médicaments prescrits chaque jour pour rester à peu près «opérationnel». Lors de cette intervention (également filmée), les spécialistes du CHUV lui implantent des électrodes dans le cerveau avec l’objectif d'harmoniser les mouvements. Dans un premier temps, sa qualité de vie s'améliore visiblement. Yves peut à nouveau contrôler ses mouvements, la préparation des repas ne prend plus des heures et il fait lui-même ses courses. Mais ce répit sera de courte durée.
Maya, sa mère, qui l'a soutenu jour après jour pendant ses années de souffrance, décrit la dégradation inexorable intervenue quelques mois après l'opération. «Il ne pouvait plus manger, la moitié de son cerveau ne fonctionnait plus, il est resté des semaines à l'hôpital – et malgré tout, il a gardé sa joie de vivre et a continué à faire ses exercices quotidiens. Mais cela devenait tout simplement trop fatigant et trop frustrant, même pour quelqu'un qui avait une volonté de fer comme Yves.» Plusieurs de ses anciens collègues de golf sont venus lui faire leurs adieux. Dans le film mentionné plus haut, son fils Arno rend un magnifique hommage à son père. Yves Auberson, ce combattant admirable, nous a quittés un jour de printemps en 2023.